CHAPITRE VIII

 

Peu après ces derniers et tragiques événements, Maxwell recevait un câble d’Europe, par le truchement de son téléenregistreur.

L’adjoint de Mac-Corry tendit la bobine à sa secrétaire, d’un geste machinal.

— Allez traduire ce message, Joan. Si Mac-Corry, lui, comprend le français, il a de la chance !

Le policier vit Joan disparaître par la porte, la bobine à la main. Il hocha la tête, les traits stigmatisés par la fatigue et l’effroyable travail mental auquel il devait se livrer.

Maxwell devait s’occuper de tout, depuis que Mac-Corry avait pris le commandement de son équipe spéciale. Il était surchargé de besogne, de responsabilité.

Dans sa préoccupation, il n’entendit pas Joan qui attendait pourtant devant son bureau, un papier à la main : le texte traduit et imprimé automatiquement en américain.

Maxwell leva enfin les yeux vers sa secrétaire. Il fronça les sourcils, longuement, avec l’expression de quelqu’un qui ne comprend pas.

Le papier tremblait entre les mains de Joan. Il tremblait même beaucoup. Le regard de la jeune fille exprimait une panique infinie. Ses yeux fixaient le policier, suppliants…

— Donnez, fit simplement Maxwell, la main tendue.

Dès qu’il lut les premières lignes, ses sourcils se froncèrent davantage. Tout son visage fut bourrelé de rides.

« On signale, sur la côte bretonne, que le poste radar «K » a été l’objet d’une attaque, de la part de l’ennemi invisible. Ce poste venait d’abattre un astronef inconnu, se dirigeant vers la France. Il est important de noter que les hommes du poste « K » étaient tous pourvus de scaphandres protecteurs.

« Il n’y a aucun survivant… »

Suivait une foule de détails que Maxwell dévora du regard. Il comprenait maintenant pourquoi le papier tremblait entre les mains de Joan. Il songea tout de suite à Mac-Corry, en route pour Philadelphie.

— Il faut prévenir le patron, balbutia Joan.

Maxwell avança la main vers le téléphone.

— Oui. Le mieux est que je prenne contact directement avec Philadelphie. On lui fera part de ma communication, dès son arrivée.

 

*

*  *

 

L’hélicoptère qui transportait l’équipe de Mac-Corry survolait les vastes plaines du Maryland, où s’étendaient les immenses plantations de tabac, de renommée mondiale.

Le voyage se déroula sans incident et peu avant d’atteindre Philadelphie, un hélicoptère de la police vint intercepter l’appareil du groupe spécial.

— O.K., Sergent, fit Mac-Corry en riant et en montrant sa carte. Votre système de sécurité fonctionne admirablement. Mais soyez sans crainte, je ne pense pas que nous transportions un ennemi invisible… A propos… Beaucoup de victimes à Philadelphie ?

Le sergent grimaça. Les deux hélicoptères se frôlaient et les hommes pouvaient facilement échanger une poignée de mains.

— Il est difficile de dénombrer les victimes, car nous ne retrouvons presque rien, hormis une poussière impalpable. Et c’est effarant, croyez-moi. Mais il est fort possible que le nombre des disparus atteigne le millier.

Le sergent tendit au haut fonctionnaire un papier téléimprimé.

— J’oubliais… Un message vient d’arriver pour vous de Washington. C’est urgent.

Le sergent salua et l’hélicoptère de la surveillance aérienne s’éloigna dans un bond.

Mac-Corry, passablement intrigué, décacheta l’enveloppe. Un cri lui échappa, involontairement.

— C’est Maxwell. Il nous prévient que les scaphandres sont inefficaces. La nouvelle vient de France, où un poste radar a été anéanti.

Le silence le plus absolu tomba sur ces hommes intrépides. Ils venaient de recevoir une douche glacée sur les épaules. Mais ils serraient les dents, admirables de courage et de ténacité.

— Qu’importe, nous ferons notre devoir, affirma Mac-Corry d’une voix inflexible.

L’hélicoptère se posa sur le toit terrasse de l’immeuble du Q.G. de la police, à Philadelphie. Aussitôt, une automobile fut mise à la disposition de la brigade spéciale.

Corry demanda dans quel quartier de la ville l’ennemi était le plus actif.

— Dans le centre, lui fut-il répondu. Il s’est infiltré dans les immeubles.

— Très bien. En route… Mais je me demande comment l’agresseur a pu pénétrer dans la ville, avec les barrages de fils électrocuteurs.

Kériany se gratta le menton et réfléchit quelques secondes.

— Effectivement, à moins de passer par-dessus, il est impossible de franchir le réseau de fils électrocuteurs, sans être foudroyé. Je ne vois donc qu’une hypothèse possible.

— Laquelle, Kériany ? grimaça Mac-Corry.

— Eh bien ! l’agresseur a dû pénétrer dans la ville avant, la pose des barrages.

Cependant, la voiture filait à toute allure dans les rues désertes et bientôt elle stoppa à l’intersection des sixième et septième avenues.

De nombreux véhicules de la police stationnaient devant un imposant édifice et un cordon de policiers gardaient les issues.

Un sergent vint à la rencontre des nouveaux venus et salua :

— Les choses vont mal dans le coin… C’est une véritable hécatombe et nombre de nos hommes ont déjà disparu.

— En avant ! hurla Mac-Corry.

Revêtus de leurs combinaisons spéciales, Corry et son équipe s’élancèrent vers l’immeuble. Ils s’engouffrèrent sous le porche et Corry tendit la main.

— Prenons l’escalier et dispersons-nous en groupes de deux.

Aussi vite que le leur permettait l’encombrant vêtement, les policiers exécutèrent l’ordre. Ils pénétrèrent dans les appartements vides, ou bien occupés par des gens affolés et hurlants.

Corry et Kériany venaient de faire irruption dans un logement, et ils se heurtèrent à une femme qui cherchait à fuir.

La malheureuse était épouvantée. Ses cheveux en désordre retombaient sur son visage aux traits inhumains. Elle hurlait, ses mains crispées emprisonnant sa tête.

— Mon enfant ! Où est mon enfant ?

Elle criait si fort que Corry l’entendit, malgré l’isolement de son scaphandre. Dans son épouvante, aperçut-elle seulement les deux hommes qui se tenaient devant elle ?

Soudain, une formidable clarté envahit la pièce et Corry ferma vivement les yeux. Lorsqu’il les rouvrit, la femme avait cessé de hurler. Elle avait disparu !

Corry et Kériany, d’un même élan, se précipitèrent vers la porte et la refermèrent vivement derrière eux. Les deux hommes étaient livides.

— L’ennemi est là, balbutia Corry. La seule issue possible est cette porte. Quant aux fenêtres, elles sont situées au vingtième étage. Donc pas de danger d’une évasion par là… Kériany, appelez nos hommes.

Les vingt agents en cagoule se massèrent devant la porte et assurèrent dans leur main leur pistolet électrocuteur.

Puis, sur un signe de Corry, ils s’élancèrent d’un même élan dans l’appartement désert.

— Bien, fit Corry. Deux hommes vont se poster en faction devant cette porte. Qu’ils tirent sans hésitation sur toute chose insolite. Les autres, suivez-moi.

Avec d’infinies précautions, les hommes avançaient dans le couloir. C’était un spectacle impressionnant que de voir ces êtres en scaphandre, cherchant la présence de l’invisible ennemi.

Une à une, pouce après pouce, les pièces furent examinées avec une minutie extrême. Et Corry désespérait de parvenir à un résultat lorsqu’un hurlement strident vibra dans son poste récepteur.

— Alerte !

Les hommes se précipitèrent et débouchèrent en trombe dans le couloir. L’un des agents, en faction devant la porte d’entrée, manifestait une inquiétude visible. Le second gisait sur le sol, inerte, sans vie.

— Que s’est-il passé ?… Un homme à chaque porte ! hurla Corry.

Toutes les issues s’ouvrant sur le couloir furent solidement gardées sous la menace d’un pistolet électrocuteur.

— Alors, que s’est-il passé, Hariet ?

Hariet était pâle, sous le hublot de son casque. Il regarda Corry avec des yeux vagues.

— Maryam a senti qu’un objet frappait violemment le hublot de son casque. Le verre s’est brisé. Presque aussitôt, j’ai vu une éblouissante lueur l’envelopper : Voilà.

Kériany se penchait avec appréhension sur le scaphandre de Maryam.

— Son corps s’est volatilisé, comme ceux du poste « K » de la côte bretonne…

Il ramassa un objet sur le sol et le tendit à Corry.

— Eh bien ! que dites-vous de cela ?

C’était une petite statuette en bronze qui pesait déjà un certain poids. Corry examinait l’objet avec une curiosité accrue.

— Ce bibelot est d’origine terrestre. Il me semble même l’avoir aperçu dans l’une des pièces de cet appartement… Mes amis, ceci prouve que nos scaphandres ne sont pas aussi inefficaces que le prétend Maxwell. Leur seul point sensible est le hublot du casque, qui, une fois brisé, ne nous protège évidemment plus. Sinon, pourquoi notre agresseur aurait-il lancé cette statuette à la face de Maryam ? Parce qu’il recherchait un moyen de vaincre l’étanchéité de nos scaphandres. Ce moyen, il l’a facilement découvert : la glace du hublot.

Corry scruta le couloir d’un regard pénétrant. Il aperçut ses hommes, en faction devant les différentes portes.

— Aucune de ces portes ne s’étant ouverte depuis le cri d’alerte poussé par Hariet, j’en conclus que notre agresseur doit se trouver dans ce couloir. Mais il se tient coi, impressionné par notre nombre. L’attaque dont a été victime Maryam prouve que notre ennemi cherchait à forcer la porte d’entrée, pour s’enfuir. Alors, à défaut de l’avoir vivant, nous l’aurons mort. Que pas un pouce de ce couloir n’échappe à nos pistolets électrocuteurs.

Les armes crachèrent des éclairs sans discontinuité. Le corridor prit l’aspect d’un effrayant orage électrique, où le tonnerre n’intervenait pas. Protégés par leurs cagoules, les policiers tiraient au hasard, avec le même acharnement, environnés d’éclairs simultanés.

Cette étrange lutte contre l’invisible dura cinq bonnes minutes. Inépuisables, les pistolets électrocuteurs vidaient leurs décharges mortelles.

— Stop ! hurla Corry en levant le bras.

Alors chaque homme s’accroupit sur le sol carrelé et avança timidement les mains. Kériany, le premier, découvrit ce qu’il cherchait.

Sa main gantée se posait sur « quelque chose », qui n’était pas le carrelage. Quelque chose d’invisible, d’indéfinissable, mais dont les contours, au toucher, rappelaient la forme humaine.

Corry se redressa, un éclair dans les yeux.

— Enveloppez-moi ça dans un drap ou une couverture. Puis ficelez-le solidement par surcroît de précaution.

Le bizarre colis fut prêt. Il n’était guère plus volumineux qu’un homme. Peut-être moins…

Chargés du précieux fardeau, les agents en cagoule regagnèrent en toute hâte leur voiture, provoquant la curiosité de leurs collègues.

— En route pour Washington et le centre biologique, ordonna Corry. Spricey va avoir du travail.

Attaque sub-terrestre
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